La cité des Sciences et de l'Industrie a invité Luc Abbadie, directeur du laboratoire Biogéochimie et écologie des milieux continentaux, pour parler du sujet de l'ingénierie écologique. Le lien est disponible ici : L’ingénierie écologique pour réparer ou améliorer les écosystèmes.
J'ai été agréablement surprise par cette conférence, qui permet de prendre du recul sur l'écologie scientifique en elle même. De nombreux termes que l'on entend de plus en plus sans vraiment savoir quoi mettre derrière sont expliqués. Ils sont aussi remis dans le contexte de leur apparition avec une approche historique.
Les enjeux de viabilité et d'habitabilité de la Terre sont rappelés.
Il cite des exemples d'approches législatives (Clean Water Act) et des évaluations économiques qui ont permis d'aller vers des solutions “basées sur la nature” plutôt que sur les solutions technologiques classiques.
Ces solutions dites basées sur la nature s'inspirent des mécanismes qui gouvernent spontanément les écosystèmes : l'auto-organisation, la diversité de structures hétérogènes, et une certaine résilience.
Il incite à rester vigilant car le vivant peut vite impacter de très grandes surfaces. Une mauvaise idée peut conduire à des catastrophes.
En effet, l'écologie est une discipline complexe avec son approche systémique. Il faut prendre en compte les conséquences d'une action sur de nombreux acteurs liés par des interactions. Les systèmes ne sont pas linéaires, il existe des effets de seuil, des effets de décrochage. Les statistiques associées sont très complexes.
⇒ Pour une meilleure résistance aux pathogènes, aux ravageurs, mais aussi pour une meilleure productivité en minimisant les intrants nécessaires : la diversification est la piste la plus sérieuse : maximiser la diversité des espèces et la diversité génétique au sein de chaque espèce.
⇒ Les forêts sont présentées comme source de solution, mais les expérimentations sont lourdes et demandent du temps.
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La notion de service écosystémique admet la dépendance de l'humanité aux fonctions écologiques (support de vie, régulation du climat, de l'érosion, approvisionnement, loisir, …). Il est maintenant formalisé et reconnu que nos possibilités d'agir et nos choix en dépendent. Cependant, une approche trop figée et utilitariste peut nous faire passer à côté d'éléments importants qui n'ont pas éveillé l'attention à un instant t et pourraient se révéler importants plus tard.
Le principe des compensations est un fort moteur qui amène à la mise en place de nombreuses actions de restaurations d'écosystèmes. Cependant, comme la possibilité de compenser est offerte, certains acteurs ayant les moyens peuvent se permettre de détruire plus. De plus, les équivalences ne sont pas estimées de manière approfondie, c'est souvent l'indicateur de surface qui est utilisé uniquement. Cela fait que l'on est en général loin du compte au niveau du système restauré, surtout qu'il est actuellement possible de détruire plus de surface que l'on n'en restaure. En général, toute l'attention est portée à quelques espèces emblématiques, mais le reste de la communauté qui habitait l'écosystème n'est même pas évalué.
⇒ Il serait donc intéressant de construire une approche quantitative de l'équivalence, par exemple en quantifiant la connectivité des milieux, la vitesse de dispersion des espèces. Il serait important de prendre en compte le temps qui sera nécessaire pour le nouveau système pour être pleinement fonctionnel. Ce “retard” avant que la compensation soit effective devrait être intégré dans la facture.